n° 125-126 / Publier à la tangence de la littérature, des arts et des sciences – Spécial 40e anniversaire

2021
Numéro préparé par Hervé Guay (Université du Québec à Trois-Rivières) et Roxanne Roy (Université du Québec à Rimouski)

Table des matières

Liminaire
Hervé Guay et Roxanne Roy

I. Sciences exactes et sciences du vivant

Qu’est-ce que la math-fiction ?
Dominique Raymond

Asphyxier l’océan une conquête à la fois : l’exploration sous‑marine chez Philippe Diolé et Philippe Tailliez
Myriam Marcil-Bergeron

Explorations géopoétiques au confluent de la littérature, de la géographie et de la botanique
Rachel Bouvet

Après la modernité, la préhistoire : environnement technique et réagencement sensoriel dans High-Rise de J. G. Ballard
Pierre-Louis Patoine

La littérature et les humanités médicales : examen d’une tension irrésolue
Daniel Laforest

II. Humanités et médias

Expériences de pensée et pensée du possible, de Fontenelle à Rousseau
Christophe Martin

Droit et littérature, droit comme littérature ?
Christine Baron

La femme antifasciste espagnole dans les périodiques français dédiés au secours et aux droits de l’homme (1936-1939)
Anne Mathieu

La fiction radiophonique comme œuvre littéraire ? Apports et limites des approches littéraires à l’étude des œuvres radiophoniques
Caroline Loranger

Les sciences humaines à l’ère hypermnésique : les nouveaux défis de la recherche en arts et lettres
Jean-Marc Larrue

III. Arts

Création et communication : une approche média-littéraire
Philippe Ortel

Le détour par la peinture. Écrire la catastrophe
Martine Créac’h

Délices de la puanteur
Frédéric Charbonneau

L’idéalité musicale du roman : dissolution ou renaissance ?
Frédéric Sounac

De la house au ballet : décolonisation de la danse en France
Lucille Toth

$12.00

Qu’est-ce que la math-fiction ?

Dominique Raymond

La littérature et les mathématiques sont généralement envisagées comme deux domaines parallèles, les rives droite et gauche d’un océan que quelques ponts et passerelles permettraient de franchir. Cet article propose de considérer autrement les liens entre les deux domaines, en pensant la math-fiction comme un genre littéraire. Partant du constat que les exemples de fictions qui représentent ou actualisent les mathématiques sont nombreux et variés, nous nous attachons à cerner quelques prédicats susceptibles de définir la math-fiction.

Asphyxier l’océan une conquête à la fois : l’exploration sous-marine chez Philippe Diolé et Philippe Tailliez

Myriam Marcil-Bergeron

Corriger les « erreurs » de Vingt mille lieues sous les mers : telle est la devise des auteurs ayant raconté leurs premières plongées en scaphandre autonome dans les années 1950. Pourtant, la promotion d’un discours scientifique neutre, purgé des invraisemblances associées au roman de Jules Verne, bute contre le recours inévitable au langage et à des effets littéraires pour exprimer l’ivresse des profondeurs et la métamorphose du plongeur. À partir de Plongées sans câble (1954) de Philippe Tailliez, L’aventure sous-marine (1951) et Les portes de la mer (1953) de Philippe Diolé, entre autres, cet article analyse d’abord la manière dont la surface de l’eau symbolise une frontière étanche sous laquelle l’océan demeure mystérieux et inépuisable. Il examine ensuite le rapport politique violent qui s’exprime à travers un ensemble d’hyperboles promouvant la conquête de la mer non seulement dans ces récits parus il y a plus de soixante ans, mais dans le discours océanographique contemporain.

Explorations géopoétiques au confluent de la littérature, de la géographie et de la botanique

Rachel Bouvet

Cet article présente les différentes étapes de mes explorations transdisciplinaires, nées du besoin de créer des liens, de multiplier les occasions de rencontres entre les disciplines, entre les êtres qui les incarnent. La première partie est consacrée à la géopoétique, théorie-pratique qui cherche à créer un « nouveau territoire » dans lequel se croisent les sciences, les arts et la littérature. Il s’agit autrement dit d’un champ transdisciplinaire, où la recherche et la création sont conçues comme les deux volets essentiels d’une démarche sensible et intellectuelle visant à intensifier le rapport au monde. La transdisciplinarité est ici définie comme lieu de rencontre au-delà de toute discipline, mais aussi au-delà du cadre universitaire dans la mesure où chercheur·euse·s et artistes travaillent ensemble, créant ainsi des ponts entre l’université et la communauté. La deuxième partie tente de situer l’approche géopoétique du texte littéraire par rapport aux autres approches critiques explorant les liens entre littérature et géographie, soit la géocritique, la géographie littéraire et la cartographie littéraire. Enfin, la troisième partie présente l’approche botanique de la littérature mise au point récemment par le groupe de recherche « L’imaginaire botanique », une approche s’inscrivant au croisement de la géopoétique et de l’écocritique et accordant une large place à la botanique, à la géographie et à la philosophie. Une approche qui se présentait au départ sous l’angle de l’interdisciplinarité mais qui a fini par prendre elle aussi une envergure transdisciplinaire.

Après la modernité, la préhistoire : environnement technique et réagencement sensoriel dans High-Rise de J. G. Ballard

Pierre-Louis Patoine

Écrit en 1975 par James G. Ballard, le roman High-Rise met en scène la reconfiguration d’une tour d’habitation moderne, de style brutaliste, en un écosystème au sein duquel les résidents adoptent des comportements tribaux archaïques. Cette reconfiguration permet l’émergence d’un être humain nouveau, doté de capacités sensorielles adaptées à son environnement postmoderne. Cet article explore les formes que prend cette émergence dans le roman, et la manière dont celui-ci permet au lecteur d’en faire lui-même l’expérience en rejetant rationalité et bon goût à la faveur d’une écriture sensationnaliste et d’un dépassement du principe de non-contradiction.

La littérature et les humanités médicales : examen d’une tension irrésolue

Daniel Laforest

Cet article veut donner un portrait succinct des champs de savoir de la littérature et des humanités médicales en tant que leurs interrelations se présentent à la fois comme cruciales et controversées. Cruciales parce l’essor même des humanités médicales s’est appuyé à l’origine sur la lecture et l’analyse de textes littéraires en classes préparatoires de médecine – tendance désormais institutionnalisée avec le sous-domaine de la médecine narrative. Controversées parce l’idée d’une littérature au service de la médecine et de la santé n’a pas manqué de revivifier les polémiques sur l’instrumentalisation des arts par les sciences. Alors que les humanités médicales sont devenues un champ incontournable bien au-delà du monde anglo-saxon, il apparaît nécessaire de questionner plus avant leurs liens avec les études littéraires. On le fera ici en suggérant que ces liens, dans leurs acceptions consensuelles et leurs reconductions pédagogiques, demeurent contenus et limités par une fausse dichotomie, celle d’une santé de la littérature opposée à une santé dans la littérature où la première fait figure d’éthique (extensible aux autres domaines), et la seconde de poétique (limitée aux questions langagières et esthétiques).

Expériences de pensée et pensée du possible, de Fontenelle à Rousseau

Christophe Martin

La pensée des Lumières s’est régulièrement plu à faire reposer sa force de conviction sur diverses expériences de pensée. En s’appuyant sur la typologie générale proposée par Stéphane Chauvier (Le sens du possible, 2011), on propose de distinguer d’abord des expériences de pensée empathiques particulièrement fréquentes dans la pensée empiriste et sensualiste : pour faire accéder à une connaissance que le lecteur porte en lui sans le savoir, l’expérience de pensée doit alors agir comme un filtre appauvrissant intentionnellement le réel afin de mieux mettre en valeur l’élément qu’il s’agit de faire voir en pleine lumière. Les expériences de pensée exploratrices, quant à elles, ne cherchent plus à dissiper une confusion ou à dévoiler une réalité occultée, mais à faire accepter « des énoncés nomiques que la réalité se refuse à illustrer » (S. Chauvier). De Fontenelle à Diderot, une part essentielle de la pensée des Lumières invite ainsi à concevoir des possibles dépassant la sphère du connu. Dans ce panorama, une place spécifique doit être accordée à Rousseau, non seulement parce que l’expérience de pensée et la pensée du possible occupent chez lui une place considérable, mais parce que, dans son œuvre, l’expérience de pensée tend à articuler un élément de simulation empathique et une visée exploratrice. Avec Rousseau, l’expérience de pensée n’ouvre plus à la spéculation : elle ménage avec le réel un rapport de distance critique qui invite à discerner en lui tous les possibles qu’il recèle.

Droit et littérature, droit comme littérature ?

Christine Baron

Le mouvement « droit et littérature », initié par des juristes soucieux d’éclairer leur pratique par des exemples littéraires qui mettent en scène le droit, va aujourd’hui bien au-delà de ce qu’ont imaginé ses pionniers américains. Cette école de pensée, née aux États-Unis au début du XXe siècle, illustre tantôt le droit dans la littérature, la littérature face au droit (procès d’écrivains, censure), tantôt le droit comme littérature ou même le droit par la littérature. En effet, l’énonciation littéraire, en mettant l’accent sur des communautés discursives, des évolutions sociales, des représentations collectives, ne se contente pas de représenter la justice, elle la problématise, lui donne vie, l’inquiète, voire la modèle. Ce dialogue disciplinaire se nourrit entre autres de similitudes méthodologiques ; de la production des textes à leur lecture, la littérature fait usage de récits, s’interroge sur l’interprétation, comme le droit. À partir de cette interaction se développe une histoire très différente du mouvement aux États-Unis et en Europe : des contextes historiques, littéraires et enfin théoriques permettent d’expliquer l’intérêt tardif de l’Europe pour cette tendance qui se développe dans les années 1990-2000 sur le continent. L’invention du genre de la jurisfiction, en élargissant les perspectives sur la pratique du droit, donne une nouvelle dimension à ce courant de pensée et en confirme la valeur heuristique.

La femme fasciste espagnole dans les périodiques français dédiés au secours et aux droits de l’homme (1936-1939)

Anne Mathieu

L’article étudie les images des femmes espagnoles durant la guerre d’Espagne (1936-1939) dans six périodiques de la gauche de l’échiquier politique français émanant d’organisations de secours, de droits de l’homme et de comités. Les reportages, témoignages, éditoriaux et articles de commentaire font apparaître des thématiques topiques similaires et une vision contrastée jetée sur les femmes à cette période. La confrontation entre les divers périodiques conviés, au travers des genres journalistiques susmentionnés, montre la façon dont les femmes participent du combat. Une participation s’inscrivant dans une dynamique universelle mais aussi singulière, qui s’illustre notamment par un « héroïsme du quotidien » (Edith Thomas). En outre, comme le reste de la population civile, les femmes sont la cible des bombardements et les subissent dans leur quotidien et leur chair. Elles sont, aussi, celles qui connaissent l’exode ou l’exil. Le système discursif de ces articles antifascistes connaît alors une transmutation de la catégorie de femme vers celle de mère. Mais face aux multiples aléas et embûches de l’exil, la seconde s’y estompera pour laisser place à la dénonciation du danger encouru par la femme seule. Ces divers articles antifascistes pendant la guerre d ’Espagne permettent autant d’éclairer la vision des femmes espagnoles pendant la guerre et l’exil que les images portées sur les femmes dans leur globalité à cette période. Ils permettent, aussi, de nourrir la connaissance sur les périodiques des organisations de secours, de droits de l’homme et de comités et sur l’histoire de la réception de la guerre d’Espagne.

La fiction radiophonique comme œuvre littéraire ? Apports et limites des approches littéraires à l’étude des œuvres radiophoniques

Caroline Loranger

La littérature s’est rapidement saisie de la fiction diffusée à la radio. Perçue d’abord comme un texte plutôt que comme une performance, la fiction radiophonique est alors devenue un genre littéraire, à la différence que sa diffusion se faisait par l’entremise d’un autre type de support : les ondes radio. Cette manière de conceptualiser la fiction radiophonique a toutefois le défaut de laisser de côté toute sa dimension sonore. Pour régler cette lacune, on l’a plutôt rapprochée du théâtre, en appuyant sur sa dimension dramaturgique découlant du jeu des acteurs et sur le travail des bruiteurs. Envisager la fiction radiophonique selon ces deux approches a toutefois ses limites et un retour réflexif sur la catégorisation et sur les enjeux de celle-ci est désormais nécessaire tandis que la numérisation des corpus radiophoniques rend ceux-ci de plus en plus accessibles aux chercheurs et aux chercheuses. Cet article propose ainsi une réflexion sur le positionnement de la fiction radiophonique dans l’écologie des genres littéraires et médiatiques dans l’optique de saisir avec plus d’acuité les enjeux que soulève son étude.

Les sciences humaines à l’ère hypermnésique : les nouveaux défis de la recherche en arts et lettres

Jean-Marc Larrue

En 2023, l’UNESCO célébrera les vingt ans de « la Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel » dont le but était d’assurer la préservation des pratiques, représentations, expressions, connaissances et savoir-faire que des communautés reconnaissent comme faisant partie de leur patrimoine culturel. L’initiative était ambitieuse, elle incluait l’identification, la documentation, la recherche, la préservation, la protection, la promotion, la mise en valeur, ainsi que la revitalisation des différents aspects de ce patrimoine. Les discussions qui ont mené à l’adoption de cette convention avaient commencé au tournant des années 1980, c’est-à-dire au début de ce que Milad Doueihi a qualifié de « grande conversion numérique ». Or, la Convention n’a pas pris en compte les bouleversements majeurs qui s’annonçaient et qui allaient avoir pour conséquence d’indifférencier le patrimoine culturel immatériel à l’intérieur du vaste univers infonuagique en formation. Il résulte de cela, aujourd’hui, un état paradoxal, celui d’une hypermnésie amnésiante, qui affecte particulièrement le champ des sciences humaines. Le projet LIRAHC, que décrit sommairement l’article, fait partie des initiatives actuelles qui tentent de distinguer les traces du patrimoine culturel du magma des données immatérielles, et d’en assurer la préservation autant que la diffusion.

Création et communication : une approche média-littéraire

Philippe Ortel

Où se situe la frontière entre communication et création ? Le terme de « création », qui tend aujourd’hui à se substituer à celui d’œuvre, est employé par le monde médiatique lui-même pour qualifier les fictions diffusées en ligne. Les questions de poétique des œuvres sont donc toujours d’actualité pour décrire les différents régimes de la mimésis mais demandent à être articulées aux questions médiales et intermédiales contemporaines. Cet article distingue quatre régimes de création au sein du processus de représentation :  représentationnel, fictionnel, figural et performatif. Il les compare terme à terme à partir de leurs modalités de production, de réception et d’évaluation dans un tableau de fonctions qu’il commente succinctement une à une. Certaines de ces fonctions sont inscrites dans la tradition critique, d’autres sont des propositions. Prenant aussi bien ses exemples dans la littérature que dans les arts, cet article essaye de comprendre ensuite le rôle joué par les innovations médiales ou intermédiales dans l’élaboration de ces différents régimes.

Le détour par la peinture. Écrire la catastrophe

Martine Créac’h

Dans L’adieu à la littérature. Histoire d’une dévalorisation, XVIIIe-XXe siècle, William Marx rappelle que la « poésie du désastre » était encore possible au XVIIIe siècle lors du tremblement de terre de Lisbonne car « les pouvoirs de consolation faisaient partie des attributions immémoriales de la poésie », mais qu’elle est devenue impossible au XXe siècle pour la Grande Guerre puis pour la Shoah. En témoigne la « trop fameuse » phrase d’Adorno : « écrire un poème après Auschwitz est barbare ». William Marx prend acte de l’impossibilité pour la poésie du XXe siècle de dire la catastrophe, que celle-ci désigne un événement naturel ou un massacre. Je voudrais revenir sur ce constat en montrant que la peinture du passé a pu offrir un recours pour dire ce qui apparaissait comme un indicible. Je fais la double hypothèse, à partir de trois approches d’écrivains du XXe siècle (Claude Simon, Michel Leiris et André du Bouchet), que la puissance de certaines œuvres d’art du passé tient à leur capacité d’accueil d’événements qui ne les ont pas inspirées et que la poésie, par sa modalité intempestive, est nécessaire et précieuse précisément lorsqu’il s’agit de se tourner vers l’art des maîtres anciens pour exprimer des catastrophes présentes.

Délices de la puanteur

Frédéric Charbonneau

L’article propose la relecture et la confrontation d’une dizaine d’œuvres, certaines mineures, d’autres canoniques, écrites entre 1629 et 1887 et consacrées en tout ou en partie au fromage envisagé sous l’angle de la puanteur comme source paradoxale de jouissance ou au contraire comme répulsif. Du Cantal de Saint-Amant au Ventre de Paris de Zola, l’expérience de cette puanteur témoigne en ses évocations non seulement d’une profonde transformation, mais d’une remarquable réversibilité, qu’éclairent tour à tour l’histoire de la sensibilité olfactive (Alain Corbin) et la pensée esthétique moderne. En effet, le XVIIIe siècle voit succéder peu à peu à l’habitude immémoriale des exhalaisons fétides et des senteurs animales la recherche de fragrances légères et végétales. Cet abaissement des seuils de tolérance entraîne l’atténuation des odeurs incriminées, soit par dosage soit par mélange : on peut risquer un parallèle avec ces pharmaka dont l’emploi et la dilution déterminaient seuls la nocivité ou la bénignité. Dans le paysage olfactif moderne, pareille ambivalence constitutive acquiert une dimension qu’on nommera faute de mieux esthétique et qui établit la réversibilité du goût et du dégoût, de l’attrait et de la répugnance en fonction de la concentration de l’objet, comme le suggère Baudelaire dans son essai Du vin et du haschich.

L’idéalité musicale du roman : dissolution ou renaissance ?

Frédéric Sounac

L’idée d’une tension des formes romanesques vers les structures musicales, étroitement dépendante du projet romantique de « poésie universelle progressive », s’impose progressivement, accompagnant le mouvement d’absolutisation de la musique instrumentale, à partir de la toute fin du XVIIIe siècle. Cet article se consacre dans un premier temps au rappel des principaux attributs de ce dispositif utopique, appelé méloforme, pour observer ensuite ce que l’on peut appeler sa sécularisation : coupé de la foi romantique en la suprématie de l’art et privé de ses racines ontologiques, le roman « musical » a tendance, après la Seconde Guerre mondiale, à adopter une attitude plus pragmatique, s’incarnant notamment en des récits moins totalisants, souvent isomorphiques d’opus musicaux singuliers. Dans la période récente, avec des romans tels que Le temps où nous chantions de Richard Powers, Apologie de la fuite de Léonid Guirchovitch, Confiteor de Jaume Cabré ou encore Central Europe de William T. Vollmann, il semble que l’on assiste à une « renaissance » de fictions complexes et ambitieuses, polyphoniques et réflexives, renouant, sans pour autant revenir à l’ensemble de la doctrine romantique, avec l’idée d’une idéalité musicale du texte littéraire.

De la house au ballet : décolonisation de la danse en France

Lucille Toth

Lutte des classes, violences de genre, racisme systémique, certaines danses, tels le hip-hop, la house ou le voguing, se sont historiquement faites porte-parole de voix minoritaires en devenant un espace intersectionnel qui met en corps la pluralité des identités françaises. Parallèlement, d’autres danses, telles que la danse classique ou les danses folkloriques, sont utilisées comme moyen de modeler les corps et de les uniformiser au profit d’une docilité sociale et pour conserver une danse créée sur un modèle impérialiste. En explorant la house, danse encore méconnue par le large public en France, et en la confrontant à la danse classique, cet article cherche à réfléchir sur la résistance française à penser la danse actuelle dans sa diversité. Il répond également au débat actuel sur la décolonisation des arts opposant « antiracistes » et « universalistes ».